lundi 16 août 2010

Le système verbal en tachelhit

Le système verbal : un système d’oppositions thématiques à valeurs aspectuelles
Plusieurs recherches de phonétique instrumentale (Omar Ouakrim et Naïma Louali/Gilbert Puech) confirment cette analyse.
A la suite des travaux d’André Basset (1929, 1952), la majorité des berbérisants ad-mettent un système "berbère commun" ternaire, opposant trois thèmes fondamentaux marqués par un jeu d’alternances vocaliques et/ou consonantiques :

Aoriste Intensif ~ Aoriste ~ Prétérit

[itératif/duratif/inaccompli] [neutre/indéfini] [ponctuel/défini/accompli]
i-kerrez --------ykrez (y-kraz ?)----------ykrez
ittak°r---------yak°r----------yuker

krz = "labourer" ; ak°r = "voler, dérober" ; i-/y- = 3e pers. masc. sing. (= "il")

Il existe deux autres thèmes, un prétérit négatif (ou "thème en /i/") et, localement, un aoriste intensif négatif, mais ces deux formes n’ont plus d’existence fonctionnelle autonome en synchronie ; ce ne sont que les allomorphes (en contexte négatif) respectivement du prété-rit et de l’aoriste intensif. Le touareg présente également un thème de prétérit intensif (ou "ac-compli résultatif"), qui paraît secondaire. Le noyau fonctionnel synchronique, commun à tous les dialectes berbères, se limite donc aux trois thèmes ci-dessus. S’agissant d’un système "commun" ou "moyen" berbère (donc non observable en tant que système d’oppositions syn-chronique réel), la valeur exacte de ces thèmes prête à discussion et des approches diverses ont été développées par les berbérisants depuis André Basset. Le caractère aspectuel de ces oppositions est très généralement admis, mais les définitions et la terminologie varient d’un auteur à l’autre. L’aoriste est le plus souvent considéré comme la forme non-marquée (formel-lement et sémantiquement), à valeur "neutre"/"indéfinie", de ce fait polyvalente et déterminée par le contexte ; le prétérit est opposé comme un "défini"/"précis"/"ponctuel" ou "accompli" à l’aoriste intensif décrit comme un "extensif"/"duratif"-"itératif" ou "inaccompli" (Cf. Basset 1952, Penchoen 1973, Galand 1977, 1987, Bentolila 1981, Prasse 1986, Chaker 1984, 1995...).
Ces formes thématiques sont, partout, relayées secondairement par des morphèmes pré-verbaux, à valeurs aspectuelle, modale ou temporelle, de sorte qu’en synchronie, les opposi-tions thématiques ne suffisent absolument pas pour décrire le fonctionnement des systèmes verbaux réels : la description doit toujours intégrer des formes complexes à préverbes. Ces préverbes proviennent de la grammaticalisation, plus ou moins avancée :
– d’unités déictiques, de locatifs et de subordonnants spécifiant les thèmes primitifs d’aoriste et d’aoriste intensif ;
– d’anciens auxiliaires verbaux marquant diverses valeurs temporelles (futur, passé ré-volu, concomitance, actualité) ;
– enfin, d’innombrables auxiliaires verbaux, appartenant aux classes lexico-sémantiques du mouvement, des attitudes physiques, de l’état et de la durée..., apportant au verbe auxilié de subtiles nuances aspectuelles, temporelles et/ou modales.
Certains de ces préverbes sont très anciens puisque quasiment pan-berbères (ad "non-réel/non-effectif"), d’autres plus récents et plus localisés (ra, rad morphème de futur en chleuh)… Mais, malgré l’absence de témoignages conséquents sur les formes anciennes de la langue, la dialectologie, par la comparaison des multiples formes de l’infinie variété du ber-bère, permet de reconstruire assez aisément les processus diachroniques et de proposer, dans la plupart des cas, des étymologies solides et des chaînes de grammaticalisation cohérentes (Cf. Chaker 1997)..
La syntaxe : structures élémentaires de l’énoncé
En berbère, langue à opposition verbo-nominale, c’est, très classiquement, le verbe qui constituent généralement le noyau prédicatif. Le verbe, qui est un uni-fonctionnel prédicatif, peut cependant, dans certains contextes (notamment en proposition relative), perdre cette fonction pour devenir un simple déterminant lexical fonctionnellement équivalent à un adjec-tif.
La majorité des énoncés sont donc construits autour d’un prédicat verbal constitué par la forme verbal obligatoirement associée à un indice de personne, selon l’ordre canonique suivant :


Verbe + (1er déterminant Nom) + (2e déterminant Nom) + (3e déterminant Nom)
Prédicat + Complément explicatif + Complément direct + Complément indirect
y-fka umàar idrimen i umddakk°l-ns
il-a donné vieux argent à compagnon-son
= le vieux à donné (de l’)argent à son compagon

Dans cette séquence, umàar ("vieux/vieillard" avec la marque de l’état d’annexion) est consi-déré comme une expansion ("Complément explicatif") au même titre que les autres syntagmes nominaux de l’énoncé : comme eux, il est toujours supprimable ; de plus, il ne peut se substi-tuer à l’indice de personne du verbe (y–,"il") qui n’est donc pas, syntaxiquement, un pronom.
Cet ordre "neutre", qui est surtout celui du récit, est souvent concurrencé dans le dis-cours par une séquence à extraposition et thématisation :

amγar y-fka idrimn i umddakk°l ns
vieux il-a donné argent à compagnon-son
= le vieux, il à donné (de l’)argent à son compagon

Sachant que tous les constituant de l’énoncé peuvent occuper cette position d’extraposition, marquée par une rupture tonale, les berbérisant analysent généralement cette construction, non comme une simple phénomène stylistique ou pragmatique, mais comme une fonction syntaxique particulière, intégrée à la grammaire de la langue et dénommée "Indicateur de thème" (Galand 1964).

Les verbes et conjugaisons :

Il n'existe pas de catégorie de verbes comme en français, du moins ce travail reste encore à faire. Nous allons seulement en présenter les principales règles et des exemples.

Introduction :
Les personnes et les genres sont exprimés par des suffixes et préfixes ajoutés à la racine de base du verbe qui peut être modifiée ou non. Représentons cette structure par :

je :----γ,(gh)
tu :t ---t
il : i----a
elle : t---a
nous : n---a
vous (masculin) :t---am
vous (féminin) t---amt
ils : -----an
elles : ----- ant

Le présent (aoriste)
Pour exprimer le présent, il faut rajouter la particule ar devant le verbe conjugué sinon, c'est le passé qui est exprimé. Dans ce qui suit, on suppose le ar mis devant tous les verbes

1. être : g noté eg ( être, exister, faire )

je suis---------------------- giγ
tu es----------------------- tgit
il est------------------------ iga
elle est --------------------tga
nous sommes------------ nga
vous êtes (m) ------------tgam
vous êtes (f)--------------- tgamt
ils sont ----------------------gan
elles sont-------------------- gant

Aucun commentaire: