lundi 28 mars 2011

grammaire_syntaxe_ lexique de tachelhit

Grammaire - Syntaxe

Dans la syntaxe de base, la caractéristique la plus marquante est indiscutablement la généralisation de la phrase nominale àcopule verbale g “faire / être” (g + nominal a l`état libre). Ce type de syntagme prédicatif, bien attesté dans tout le Maroc, est connu a l`état de traces en kabyle et touareg; en tachelhit, il est d`un emploi très généralisé et semble avoir remplacé de manière systématique les séquences à auxiliaires de prédication d (d + nominal) bien connues dans tout le reste du berbère nord mais qui ne sont plus attestées qu'à l`état résiduel en chleuh, notamment en contexte négatif. On y relève ainsi: iga aderghal = “il est aveugle / mal voyant” mais au négatif “ur igi aderghal” coexiste avec la phrase purement nominale “ur d aderghal”.

Parmi les traits morphologiques caractéristiques, on relèvera également le maintien de l'accord de nombre du participe verbal que la plupart des autres dialectes berbères nord tendent a traiter comme forme invariable: “iddan” (sing), ddanin (plur.), participe du verbe “ddu” (aller). En revanche, le chleuh, comme l`ensemble du Maroc, a complètement abandonné l'ancienne conjugaison par suffixes des verbes d'état qui, ici, se combine avec le jeux “standard” des indices de personnes.

Mais c'est sans doute au niveau du système verbal que la tachelhit présente les spécificités les plus marquantes; on peut même le considérer comme l'un des systèmes les plus évolués de l`ensemble berbère. Evolution au niveau des signifiants,
- avec la constitution d'une nouvelle forme par association obligatoire de la particule “ar” à l'aoriste intensif (ar iteddu, “il va”)
- avec une forte tendance (notamment dans le Souss) a perdre le thème de prétérit négatif (“ theme en /i/”), et surtout,
- avec la dissociation et la démultiplication des formes issues du complexe “ad” + aoriste: “rad” (issu de “ira ad”) a valeur temporelle (futur) s'oppose désormais a “ad” (à valeur modale) et des formes de futur immédiat se sont constituées dans de nombreuses régions à partir de complexe “ddu” (“aller”) + ad + Aoriste) ( > ddad + aoriste).

Et bien sûr, corrélativement, au niveau des signifiés et du fonctionnement global du système, avec la “naissance” du temps (Leguil, Cf Bibl.), induite par la distinction entre le modal (ad) et le temporel (rad / ddad), et par la généralisation de la valeur de concomitance (donc de présent) du complexe “ar” + aoriste intensif. Le système verbal chleuh est ainsi celui qui, le plus nettement, a introduit la temporalité dans un système primitivement aspectuel. (Cf “Aspect” EB)

Lexique


Le lexique chleuh, bien que présentant une forte influence de l'arabe comme tout le berbère nord est néanmoins l'un des moins contaminés : le taux d'emprunts a l'arabe, établi a partir d'une liste diagnostic, est de l'ordre de 25 %, bien inférieur a celui des dialectes méditerranéens (kabyle: 38 %) (Chaker 1984).

Le chleuh (du moins un certain nombre de ses parlers) est également l'un des rares dialectes a avoir conservé l`ancienne numération berbère, bien que dans les zones de contacts intenses (notamment urbaines), la numération arabe ait tendance a se répendre.

Études linguistiques et développements récents

Le chleuh a été l'un des dialectes les plus étudiés par la tradition berbérisante occidentale; a la fin des années 1920, on disposait déjà de travaux descriptifs et de corpus importants (Stumme, Destaing, Laoust, Justinard). Il a connu un tres vif regain d'intérêt depuis une vingtaine d'années du fait de la formation rapide d'une nouvelle génération de berbérisants marocains, qui sont, dans une large proportion, originaires du domaine chleuh. Ces travaux récents, totalement intégrés dans les grands courants de la linguistique actuelle (l'influence du générativisme notamment y est très forte) se sont d'abord intéressés a la morpho-syntaxe, puis plus récemment au lexique et a la phonologie.

Ce développement vigoureux de la recherche sur la langue et la littérature chleuh est, dans une certaine mesure, relayé par le dynamisme de la société civile chleuh, notamment soussie : la plupart des publications berbères, scientifiques ou culturelles, parues au Maroc depuis 20 ans sont l'oeuvre de Chleuhs; de même, les associations culturelles les plus actives et les plus efficaces sont pour l`instant presque toutes chleuh. Le dynamisme et l'efficacité de l'Association de l`Université d'été d'Agadir, qui a déjà organisé quatre rencontres importantes depuis 1980, mérite tout particulierement d'être signalés.

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